Chaque matin du 30 novembre, une douce effervescence s’empare de l’Écosse. Et pour cause ! C’est le jour anniversaire du martyre de saint André, protecteur certifié du pays, et honoré partout et par tous depuis des temps immémoriaux.
Mais qui est saint André ?
Saint majeur de l’Église catholique, André « le courageux », frère de saint Pierre, fut l’un des douze Apôtres qui suivirent Jésus en Galilée, et versèrent leur sang pour Lui en répandant l’Évangile à travers le monde. C’est en Grèce que le proconsul Égée obligea André à choisir entre sacrifier aux idoles romaines ou mourir sur une croix ; l’apôtre n’hésita pas une seule seconde, choisissant avec joie le martyre à la seule condition d’être attaché sur une croix en forme de X, se jugeant indigne de mourir sur une croix semblable à celle du Christ.
Le Martyre de saint André de Bartolomé Esteban Murillo (1682), musée du Prado, Madrid, Espagne.
Ce détail en apparence anodin pour le commun des mortels prit une importance inattendue dans un petit pays d’Europe du Nord, l’Écosse.
Mais comment ? Pourquoi ?
Pour comprendre la notoriété acquise par saint André en Écosse après sa mort, il fallut se plonger dans les vieux grimoires débordants d’histoires mythiques. Parmi elles se trouve une légende épique narrant le triomphe miraculeux de nos ancêtres Pictes et des Scots, menés par le roi Óengus II (Angus II), contre les perfides Anglais, au cours du IXème siècle. Le chef royal, peu confiant dans le succès de son armée alors en grande infériorité numérique, se résolut, dans un sursaut d’espoir, à s’en remettre au Ciel. Saint André, qui déjà dans le secret veillait sur l’Écosse par le biais de ses reliques[1], lui apparut alors en songe. Dans un élan de foi en ce signe divin, le soldat promit à Dieu d’ériger le saint en patron national en échange d’une victoire. Le lendemain matin, alors que déjà s’engageait la dernière bataille, une croix blanche en forme X apparut dans le Ciel, et les hommes d’Óengus, galvanisés par ce signe surnaturel, ne firent de l’Anglais qu’une bouchée. Leur roi tint sa parole, et dans tout le pays on célébra saint André.
Exemplaire de la déclaration d'Arbroath conservé par les Archives nationales d'Écosse
Il fallut cependant patienter jusqu’à la déclaration d’Arbroath[2] de 1320, rendant à l’Écosse sa liberté chérie, pour rendre officiel le patronage de saint André.
D'azur au sautoir d’argent
Mais la renommée de l’Apôtre ne devait pas en rester là. Une nouvelle idée germa dans l’esprit des Écossais, celle de faire leur l’insigne du saint : sa croix unique. Et c’est ainsi qu’après quelques variations esthétiques, le drapeau au sautoir d’argent sur fond azur, également appelé Saltire ou drapeau de Saint-André, fut définitivement adopté vers le XVIe siècle[3].
Au fil des siècles, la dévotion nationale à saint André ne cessa de croître. Les « sociétés de Saint-André » qui fleurirent de par le monde dès le XVIIIème siècle, destinées à rassembler les émigrants Ecossais et à les aider à conserver intègres leur culture et leur identité, participèrent prodigieusement à son rayonnement. Le 30 novembre devint alors la fête nationale du pays, et fut même décrété jour férié pour qui le souhaiterait par le Parlement écossais en 2006.
Saint André fait aujourd’hui partie du paysage écossais. Cathédrales, ville, universités et même squares portent son nom béni, témoins de sa popularité.
Et comment se déroule cette incontournable journée ?
Ouvrant le bal des festivals d’hiver, dont les plus populaires demeurent Hogmanay[4] et Burns Night[5], Saint Andrew’s Day est l’occasion pour tous les Écossais, où qu’ils soient, de dépoussiérer leur kilt et de se retrouver au pub, autour d’une bonne bière ou d’un bon whisky, et d’un plat traditionnel, des aires de bagpipe et fiddle plein les oreilles, heureux de festoyer et d’honorer leurs traditions. Et fidèles à leur caractère accueillant, ils entraînent tout amoureux de la fière Alba dans le tourbillon de la fête !
Le Ceilidh, soirée traditionnelle écossaise. Prononcer Ké-lé !
C’est aujourd’hui vous, chers lecteurs, que le Comptoir d'Écosse invite à célébrer comme il se doit le saint patron du pays des spiritueux et des brebis à la panse délicieuse ! En quelques clics, un whisky – ou même un bon gin dont la renommée des cocktails est désormais établie – arrive chez vous. Alors, emmitouflé dans un bon plaid, au coin d’un feu chatoyant, nourrissant votre esprit de notre histoire nationale, vous pourrez le savourer avec bonheur.
Happy Andermas !
[1] Les reliques de saint André furent transportées par voies maritimes sur un navire qui échoua sur les côtes écossaises.
[2] Rédigée sous la forme d’une lettre envoyée au pape Jean XXII, ce document est une déclaration d’indépendance de l’Écosse sous le règne de Robert the Bruce.
[3] Le drapeau écossais est aujourd’hui l’un des plus vieux drapeaux nationaux du monde.
[4]Hogmanay correspond au réveillon du 31 décembre dans la tradition écossaise.
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